Belle-île en mer
Une histoire mouvementée!
Chouchoutée et adulée par les peintres depuis plus d'un siècle, la plus belle des îles du Ponant fut aussi très convoitée par ses voisins européens. Beaucoup plus tard, ce sont les touristes qui vont l'adopter dans leur carnet de voyage. A seulement 15 kms du continent, elle jouit d'une situation exceptionnelle: des terres fertiles aux cultures maraîchères, un port actif pour le transport de marchandises, et ultérieurement pour les balades en mer. Son microclimat lui procure une douceur presque méditerranéenne. Sous un ciel lumineux et changeant, ses sites rocheux recouverts de vagues mousseuses offrent un show d'exception amplifié et multiplié lorsque la tempête sévit. Belle-île la bien nommée ne l'était pourtant pas tout le monde... César en conquérant jaloux et vieux grincheux la qualifiait d' île vénète quelconque. Mais qu'importe : Calonesus : belle – île en grec, Bella-Insulla dans les textes médiévaux, Enez Gwell (ou gwedel) chez les bretons, c'était toujours Belle-île. Pour les moines qui en prenaient grand soin, c'était l'île de la commende : lorsque des parcelles de terre étaient offertes en guise de salaire aux religieux, ou en passe de le devenir. Pour les pirates, c'était ... la bonne planque! ce qui lui valut le nom d'île des larrons. Elle devint l'île de l'unité au temps de la révolution française. Si elle donne aujourd'hui la sensation d'être une île tranquille sur l'eau, l'histoire nous révèle au contraire un passé tumultueux : enjeu des affrontements entre Vénètes et romains, "poule aux œufs d'or" des bretons anglais chassés des îles Britanniques par les saxons, terre d'accueil de moines irlandais et Gallois. Tout le monde la veut !!! Elle devient un temps la propriété du compte de Cornouaille avant d'être finalement reprise par les Vikings.
Au 11e siècle, offerte aux Bénédictins de Redon et de Quimperlé, elle est le siège du pouvoir civil et religieux. Imposant des taxes à la population, ceux-ci en profitent pour enrichir leur abbaye. Peu à peu, les forêts disparaissent, et les religieux, encore eux! s'approprient les arbres et les coupent avant maturité dans le but d'effectuer du troc contre de nouvelles terres et agrandir leur domaine. En 1552 ce sont les anglais qui s'y collent, occupant les terres et occasionnant de nombreux pillages. Vingt ans plus tard, en 1572, Charles IX reprend l'île pour l'offrir au marquis Albert de Gondi qui devra la protéger des attaques ennemies. Ouf! enfin!!! ... Oui mais voilà! ce dernier étant très endetté la revend à Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV qui entreprend lui aussi de fortifier l'île, du moins en partie. Fouquet assure à l'île une prospérité en lançant ce qui deviendra la spécialité locale ou la Belle-îloise : la pêche à la sardine qui fournit également de l'huile aux habitant. On exploite aussi le sel sous forme de marais salants. C'est le début de l'agriculture à Belle-île. " On est sauvé" ? me direz-vous? et bien non! car Fouquet, accusé de détournements de fonds publics est arrêté et condamné à perpétuité trois ans plus tard... Finalement, le roi rachète l'île et c'est à Vauban que revient la mission de prendre en charge la défense de l'île et de la fortifier. Il crée en 1650, la forteresse du Palais et renforce la sécurité d'accès aux plages et aux îles environnantes : désormais, montrez-patte blanche! Voilà !!! ... sauf que vingt-cinq ans plus tard, en 1674, il semble qu'il y ait eu des fuites! car notre bonne terre subit en 1674, l'invasion hollandaise avec force pillages!...
Et celà va continuer.... la gloire, ca se mérite !!!
En 1720, la compagnie des Indes qui ne donne pas " sa part au chien" va exploiter l'île à des fins commerciales, de même que les fermiers généraux deux ans plus tard, et quand enfin, l'île revient aux mains de la couronne en 1759, et bien devinez quoi ? la anglais relancent les hostilités et occupe l'île jusqu'en 1763 qu'il finiront par échanger contre Minorque et le Canada. C'est alors qu'arrivent 78 familles acadiennes chassées de chez eux et prisonnières en Angleterre qui vont cultiver la terre en apportant avec eux la " rouge"... qui ne l'est d'ailleurs pas... la pomme de terre de Belle-île. A cet effet, Louix XV qui a donc récupéré cette terre de France si convoitée divise les terres en centaines d'exploitations de 10 hectares chacune en y ajoutant landes et prairies. L'histoire est finie??? presque! car pendant la grande guerre, les allemands, eux aussi, en ont fait leur " quatre-heures" jusqu'au débarquement allié. Encore heureux que les américains... avaient d'autres " chats à fouetter"... Depuis les années 60th, Belle-île est toujours surpeuplée...ce sont un peu les mêmes mais en mode touristes.
Bienvenue à bord : Vous êtes bien arrivés à Quiberon, peut-être avez-vous pris le Tire-Bouchon (petit train reliant Auray à Quiberon). Vous avez votre ticket, votre crème solaire, la bouteille d'eau, les lunettes de soleil et la casquette, vous êtes fin prêt à embarquer sur l'un des ferries de la Compagnie Océane en direction de Belle-île, dernière étape avant l'Amérique, comme s'amusent à le dire les bretons. Plusieurs autres compagnies effectuent ce trajet si vous arrivez de Lorient ou de Port Navalo. Pendant la traversée qui dure environ 45 minutes, vous aurez l'occasion de saluer les îles d'Houat et d'Oëdic (depuis Quiberon) ou l'île du Groix (depuis Lorient) avant d'apercevoir de loin la citadelle de Belle-île dont la muraille plonge dans l'océan et semble se lever à votre approche pour mieux vous accueillir. Si vous avez votre propre bateau, diriger vous vers la Pointe des poulains, Sauzon, Gouffar, ou Lochmaria au sud, qui offrent une protection contre le vent et un mouillage de qualité pour votre embarcation dans un paysage de rêve. Celui du Palais, le grand port de l'île est beaucoup plus fréquenté et offre donc moins d'intimité.
Le Palais :
A votre arrivée, vous savez tout de suite à qui vous avez affaire : Le nom de Vauban est gravé dans la pierre. Les quatre tours édifiées en 1640 par Albert de Gondi (diplomate italien et homme de confiance de Catherine de Médicis), ont longtemps fait office de prison. Des noms illustres comme Karl Marx ou Auguste Blanqui y ont laissé leur trace... Tantôt bastion de garde contre les arrivées intempestives ennemies (anglaises et hollandaises surtout!) la citadelle a aussi pour vocation d'être un havre de paix et une protection pour les hommes des galions ayant subies les attaques pirates. Elle accueille aussi les marins venant d'Amérique sur leur voilier. Au XVIIIe, elle devient un lieu de résidence renforcée par Nicolas Fouquet (surintendant des finances du cardinal Mazarin et procureur général au parlement de Paris). Le poète saint-Amant la fréquente régulièrement. Parallèlement, Vauban est envoyé par le roi pour en faire un bâtiment militaire équipé de fossés et d'escarpes, sensé défendre efficacement l'île. Même la plage est fortifiée. Et Vauban, en bon architecte a pensé à tout! Une citerne contenant 7650 l d'eau offrira un ravitaillement aux navires de passage... qui pourront ainsi repartir... sans trop " s'incruster"... du moins le suppote-t'on
Le corps de garde et la poudrière, datant de 1856, sont visibles de loin de même que le donjon. De nos jours, ce dernier est musée d'art et d'histoire datant de Louis-Philippe. Les blockaus servaient de cachot à la prison militaire. En 1775, la citadelle devient le logis du gouverneur qui fait constuire l'arsenal et le magasin à poudre. Elle est aujourd'hui la scène privilégiée de concerts, de conférences, et d'expositions régulières et offre une vue panoramique sur le port, la ville, et les îles. Une pierre blanche fait perdurer le souvenir du jour où le bastion du Havre fut ébréché par l'ennemi au cours de combats sanglants. En 1960, la forteresse est ouverte au public par un pont dormant à deux arches, doublé d'un pont levis à bascule."
Anciennement surnommé Pallaë, puis Pallay, le Palais possède le plus grand port de l'île : tour à tour port de pêche, point d'arrivée des lignes maritimes, port de commerce, et port de plaisance six mois de l'année, celui-ci occupe la place des anciens marais salants. La ville tout en longueur est un lieu de promenade idéal depuis le port d'échouage jusqu'au bassin des salines. De jolies maisons colorées et quelques maisons anciennes du XVIIIe siècle bordent ses petites rues tranquilles, bien aérées et rafraichies des embruns du port. Les remparts abrités sous les rangées d'arbres font un chemin de ronde jusqu'à l'hôpital. N'hésitez pas à sortir des sentiers battus et à vous faufiler dans les petite "coins", vous y croiserez certainement quelques artisans pêcheurs qui ravaudent leurs filets. A quelques pas, des senteurs de poissons et crustacés directement vendus sur le bateau effleureront vos narines. Au loin, arrivent des chaluts chargés de sardines, escortés par une bande de goélands toujours affamés. Si aujourd'hui, la cargaison de sardine, crustacés, homards, langoustes, et autres tourteaux s'en va fournir les conserveries, Belle-île reste néanmoins l'un des rares endroits du Morbihan où la pêche artisanale a perduré. D'ailleurs, si vous interrogez un vieil homme assis sur un banc qui fume langoureusement sa pipe en scrutant l'horizon, perdu dans ses souvenirs, voici ce qu'il pourrait vous dire : « De mon temps, la pêche était déchargée au long des quais . Les tonneaux de rogue, ces œufs de poisson salés qui servaient d'appâts étaient roulés vers les embarcations en prévision d'une nouvelle sortie puis étalés sur les chaluts. Ces grands filets de pêche soigneusement enroulés à bord avaient besoin de plusieurs hommes être remontés avec leur chargement de sardines accru du poids des pierres qui le maintenaient en position. La solidarité avant tout!" Sur les hauteurs de la ville, des chemins de randonnée poussent loin la vue sur les deux phares de la passe et sur les bateaux de pêche et de plaisance, ils relient également le port et les établissements touristiques (campings, gîte rural) sur les hauteurs.
Sauzon :
Au nord de l'île, bien posée sur une ria de plus d'un km, l'adorable petite ville de Sauzon domine la baie bien abritée du vent. Le long des quais sont alignés quelques barques de pêches. Les casiers de tourteaux, de langoustes et de homards déposés là par des pêcheurs partisans des techniques ancestrales embaument l'air jusqu'au bout du môle où le phare attend patiemment quelques yachts ou voiliers à guider à l'entrée du port. Caseyeurs et marayeurs sont déjà sur place pour la vente aux enchères avant que le soleil ne se lève où après sa disparition, pour éviter ce celui-ci n'altère la qualité du produit, et en route pour la conserverie! A l'ombre des mimosas, les jolies rues tranquilles rivalisent de maisons aux volets colorés et de jardins fleuris où se mêlent plantes grasses, locales, ou exotiques, souvent ramenées d'un voyage au long court. Dans une douce luminosité, le soir, au coucher du soleil, les cordages et les filets sèchent tantôt sur les arbres ou en longue traîne sur le quais. A travers les mailles, vous est confiée une image que vous garderez: un bout d'océan, qui vous emmêne au loin. En bordure de plage, l'hôtel du phare semble construit là pour appâter le visiteur. L'église date d'un siècle.
Harmonie et douceur de vivre sont les mots qui me viennent pour décrire cette ville. Deuxième port de l'île, sa rive droite est dénuée de construction afin de préserver un cachet d'authenticité dans la douceur pastelle du paysage. Lorsque en 1830, le roi Louis Philippe eut la bonté de financer la construction du port, la ville, en remerciement, prit pendant près d'un demi-siècle le nom de " port Philippe" avant de reprendre au début du XIXe siècle son nom d'origine. Au pied de la ville, telle une petite mer intérieure, le "fiord" marin fournit un excellent mouillage aux plaisanciers. Au sud, au niveau de Kergerck et accessible à marée basse, se trouve la grotte de l'Apothicairerie qui fut très fréquentée par l'impératrice Eugénie. De nos jours transformée en réserve ornithologique, elle fait résonner jusqu'à nos oreilles avides les cris des goélands argentés, des mouettes tridactyles, et des cormorans qui laissent leur emprunte dans le sol. Ce sont eux qui attiraient en ce lieu l'impératrice qui les voyait « alignés comme des bocaux d'onguents dans l'échoppe de l'apothicaire »; ainsi fut baptisée la grotte sur toile de fond bleu turquoise. Quelques petits futés plein d'imagination ont même remarqué que le dessin d'ouverture de la grotte est identique à la forme de Belle-île... qui serait celle d'un oiseau en plein vol, il fallait y penser !
Locmaria : Au XIe siècle, au sud de l'île, un petit village dont les habitant étaient très pieux... et superstitieux faisait parler de lui pour son culte en hommage à la vierge protectrice des marins. Les ruelles bordées de maisons blanches virent défiler de nombreux pèlerinages. Il y avait à celà une raison évidente: le village bénéficiant (et encore maintenant) d'un mouillage apprécié était aussi une "opération portes ouvertes" pour les pirates de passage. Aussi, notre dame du Boistord accueillait au sein de son église les marins qui venaient s'y réfugier. Située non loin de la pointe de Skeul et de cette fameuse grotte mythique (jamais retrouvée) où le mousquetaire Porthos aurait trouvé la mort, son église blanche, datant du XIe siècle est le le plus ancien monument de l'île. De style roman, joliment décorée de statues et de tableaux bien mis en valeur, on ne peut louper un magnifique ex-voto suspendu, et réalisé en 1862 par l'Ermite Denis. Le bateau, mesurant près de 3 mètres de long pour 2m50 de large environ, représente un trois-mâts de guerre aux voiles carrées, dont la proue est ornée d'un ange. Située à 71 m d'altitude, Locmaria est le point culminant de l'île. Ses plages environnantes (Port-Maria, Port-Blanc etc) qui étaient les favorites des armateurs d'antan, sont aujourd'hui celles des plaisanciers. Locmaria possède aussi les falaises les plus hautes de l'île.
Mais revenons un instant à Notre-dame de Boistord, puisque c'est avec elle que tout à commencé... un nom un peu tordu, me direz-vous? et bien vous n'avez pas tord! hahaha! En effet, elle est à l'origine d'une légende où un miracle aurait eu lieu : Un jour, un galion hollandais qui n'avait sans doute pas...que des bonnes intentions fut pris dans la tempête et perdit son mât. Il débarqua alors sur l'une des plage de Locmaria avec l'espoir d'y trouver du bois pour le reconstruire. Arrivant devant l'église, il découvre un orme superbe. Aussitôt dit, aussitôt fait, et voilà qu'il l'abat de sa hache. Et bien vous le croirez ou non, on raconte que le tronc se mit à se tordre dans tous les sens devenant ainsi inutilisable. Dépités, et probablement sans voix, les assaillants n'avaient plus qu'à prendre la fuite... avec à leur bord une sacré histoire à raconter à leurs petits enfants... Depuis ce jour, l'église fut surnommée " Notre dame de Boistord".
Aujourd'hui les volets des maisons ont pris de la couleur, et les ruelles se perdent toujours au cœur du village, sans doute pour mieux brouiller les pistes à qui s'aventurerait sans y être invité... Locmaria profite d'une situation privilégiée avec ses jolies petites criques couleurs lagon, tout près des pointes d'Arzic et du Skeul dont les restes de fortins donnent aux imposants rochers une note d'éternité à fleur de mer. Le soir, au coucher du soleil, les amateurs de surfs se font la part belle dans les sillons des vagues aux rouleaux écumants, le long de la falaise. Du paysage authentique se dégage une sensation de convivialité et d'intimité que l'on retrouve au sein de ses boutiques et de ses restaurants aux tables de bois recouvertes de mosaïques.
Bangor :
Dans ce site enchanteur, se retrouve l'harmonie des couleurs et le piaillement des oiseaux marins qui font résonner les parois rocheuses de nombreuses grottes sous-marine quand la mer se retire. Terre de légende, Bangor est fondée au VIème siècle par des moines. Elle accueille au XVIIIe siècle les acadiens et leur culture de pommes de terre. De pointes sauvages en petites criques intimes s'étalent des plages conviviales et sûres bordées de falaises, et un mouillage parfait pour les bateaux, accueillis par l'élégant Pétrel Fulmar qui a établi ici les fondements de sa colonie en vue de sa reproduction. La ria de Pouldon est le paradis des pêcheurs. Aux temps anciens, ces lieux enchanteurs fournissaient à marée basse quantité de pousse-pieds qui remplaçaient chez les familles pauvres le lard manquant en période de disette. S'ils avaient pour mission de nourrir l'homme, ces ciropèdes sont aussi à l'origine de nombreux accidents, souvent nichés dans les interstices réputés inaccessibles de la falaise. Ils ont pratiquement disparu aujourd'hui, en laissant là aussi une légende : Du temps où les canards venaient se réfugier au bord des estuaires envasés, attendant le retour de la belle saison, ils se rassemblaient sur les branches d'un arbre connu sous le nom d' « arbre aux canards ». Un jour, ils se transformèrent en anatifes (coquillages à pattes de canards s'accrochant à leur support). Un jour, une tempête emporta les corps vers la haute mer. Sa chair savoureuse, produit de luxe aujourd'hui, est très appréciée des populations hispaniques. Là encore le village est charmant : son petit port de pêche bordé de maisons de couleurs fait toujours rêver et invite à se sentir bien.
A l'ouest de Bangor, veille le phare de Goulphar construit en 1868 et accessible à marée basse. Edifié par les bagnards et les détenus emprisonnés à Belle-île, Il gère le trafic maritime de la région. Aujourd'hui pleinement automatisé, il bénéficie d'un contrôle suivi quant à son bon fonctionnement, et d'un entretien régulier avec réparations si nécessaire. Mais le bon gardien de phare barbu et jovial, ca c'était avant ! D'une portée de près de 50 kms, il domine la mer de 87m. A la pointe de la technique, le phare de Goulphar est l'un des plus importants de toute la côte bretonne. Un technicien nous explique : " Ce phare est l'une des principales stations d'aide à la navigation du littoral breton. Il contrôle à lui seul la presque totalité du trafic maritime environnant. Grâce à des cellules photo-électriques, il s'allume à l'heure du soleil couchant pour s'éteindre à l'aube mais aussi ou quelque soit l'heure quand le brouillard apparait." Une fois montées les 250 marches, on bénéficie d'un panorama marin superbe sur les îles du Ponant, du Croisic à Lorient. Quand le climat le permet, il est toujours possible d'apercevoir la lumière blanche clignotante des trois phares de l'île qui communiquent et se répondent... Ah s'ils pouvaient parler, que de secrets souvenirs ils évoqueraient !
A quelques Kms, le gouffre de Baguen Hir, facilement accessible entre les rias de Ster Vraz et de Ster Woen autrefois "havre de paix des pirates d'antan" constitue là encore l'un des plus beaux mouillages de Bretagne. Des traces d'une ancienne forêt fossile prouvent que l'arbre a peuplé l'île il y a 6000 ans. La pointe du vieux château est une presqu'île dans la presqu'île. Son site archéologique de 18 hectares séparé par un isthme rocheux à mis à jour un oppidum romain d'origine vénète.
Au large de Banghor, la plage du Donant est un autre petit coin de paradis couleur lagon et ourlé de dunes aux formes joliment sinueuses qui attire la dentelle d'écume sur le sable fin et doré. Le décor est encore plus saisissant dans les lueurs pastelles du coucher de soleil qui fait rougeoyer les rochers. Attention toutefois si vous vous baignez en période automnale, les lames de fond peuvent être dangereuses. Non loin, se trouvent deux "personnages immortels" : Jean et Jannes sont deux menhirs, l'un de quartz vêtu, l'autre de granit. Ce sont les dernieres pierres dréssées de l'île sur des centaines qui existaient jusqu'au XVIIIe siècle, déterrés au fil du temps par des constructeurs sans doute peu scrupuleux. C'est sans doute ce qui motiva Claude Monet à en faire une toile dans leur élément paysager naturel. Voici leur histoire : « Au temps lointain des druides, Jean le barde et Jeanne la paysanne vivaient sur la lande leur amour. Mais le druide, qui ne voyait pas d'un bon œil cette union leur jeta un sort et les figea en statue de pierre pour l'éternité. Depuis ce jours, les deux menhirs se regardent tristement." La légende précise que les soirs de pleine lune, il leur est permis de se retrouver en secret... mais malheur à qui tenterait de les surprendre. Il est dit aussi que leur nombreuse descendance se serait enfuie du côté de Carnac...
Côté mer : la côte sauvage :
La Pointe des poulains :
Nous entrons ici dans le paradis des randonneurs : Six mois de l'année, de mai à octobre, les gîtes ruraux sont plein de gens prêts à se gorger d'oxygène dans un fabuleux tour de l'île régénérant, vivifiant et plein de santé. Rien de tel qu'une bonne cure d'iode, de brise et d'embruns salés, de bains de mer et d'algues odorantes pour se sentir en forme toute l'année. Ici, les falaises abruptes et découpées résistent au temps et à l'attaque des vagues qu'elles repoussent à loisir, tel un chien qui renverrait son os pour qu'on le lui relance, le jeu est infini et incroyablement beau ! On en prend plein les yeux ! Les pointes rocheuses sont si nombreuses que l'on ne sait plus de quel côté se tourner. A peine sur les lieux, c'est un point de non-retour, nous sommes tout de suite envoutés par la quantité d'écueils à fleur d'eau, par ces grands rochers aux formes uniques, par les grottes marines accessibles par bateaux. Déjà notre esprit "se noie" dans les rouleaux moutonneux des déferlantes qui viennent mourir sur les plages; quand soudain le vent se prend au jeu et réveille l'écume qui jaillit tel un jeyser semblant vouloir laver et faire briller la roche sous le soleil d'été. Mais si vous avez choisi la saison hivernale, vous ne serez bien sûr pas déçu non plus par le spectacle que la tempête aime à sans cesse recréer. Mère nature fait la loi chez elle. C'est elle qui décide si les bateaux peuvent accoster, rester ou repartir, si par gros temps le mouillage devient dangereux. Ce qu'il y a, c'est qu'elle change souvent d'avis: tantôt menaçante, elle redevient douce et accueillante. Lunatique ou farceuse, dame nature? une chose est sure, on peut lui faire confiance, elle connait son île comme personne...
En 1894, la grande Sarah Bernard venait régulièrement à Belle-île avec sa famille et ses amis, et la faisait découvrir à des artistes peintres, écrivains, ou musiciens avide d'inspiration. Aussi, s'y fit-elle construire une résidence d'été que l'on peut encore visiter de nos jours sous la forme d'un musée. Afin de mieux immortaliser ses instants de vie, elle fit incruster dans le roc un fauteuil de pierre qui est toujours présent. Pendant la grande guerre, elle acheta même l'ancien château de Penhoêt mais celui-ci fut moins chanceux, étant en grande partie détruit par l'armée allemande. Les ruines du corps de garde crénelé ainsi que le fort Sarah Bernard font face au phare. Celui-ci fonctionnera à l’huile minérale jusqu’en 1875, puis au pétrole en 1903 avant d’être, comme ses semblables, électrisé en 1950.
Les aiguilles de Port coton :
C'est à l'ouest de l'île que le paysage bât des records. Port coton porte bien son nom puisque les "aiguilles de roche" cotonnent à loisir sous l'écume des vagues. Combien de peintres ont-ils été séduis? Combien de chanteurs en ont fait une oeuvre ? Combien de touristes en parlent encore bien des années après ? Et enfin combien d'autochtones ne quitteraient pour rien au monde ce tableau vivant ? Jean Hélion, artiste peintre du siècle dernier crée une série de toiles comme "le rocher du talus". Outre les paysages, il aimait l'atmosphère de fête et les parades qui se déroulaient régulièrement à Belle-île au XXe siècle. Henri Matisse se concentrait plutôt sur les grottes sous-marines. A la même époque, John Russel élit domicile à Belle-île pendant vingt ans. C'est à lui que l'on doit le "château de l'anglais", cette grande maison qu'il s'était fait construire dans la baie de Goulphar. Ami d'Henri Matisse, il fait aussi la connaissance de Claude Monet. Ce dernier vient régulièrement à Belle-île et séjourne dans la maison des Marec également en baie de Goulphar. L'auberge de port-coton, face à la mer, était son endroit favori. Il pouvait ainsi y prendre ses repas en se délectant du spectacle naturel. En seulement deux mois, 39 toiles naquirent ainsi de la magie ambiante de Port-Coton et de ses environs. Deux d'entre-elles sont exposées au musée d'Orsay à Paris (la côte sauvage et tempête à Belle-île). Une autre (pluie à Belle-île) orne le musée des Jacobins à Morlay. Quand aux " Rochers de Belle-île" c'est au musée des beaux-arts à Reims qu'il faut aller pour la contempler.
Mais sans vouloir rabaisser le talent et la sensibilité artistique de nos artistes français, le plus beau tableau, on ne le dira jamais assez, n'est-il pas quand même celui de mère nature avec ses humeurs tantôt sauvage, furieuse, ou gaie. Ici, la roche règne en maître sous toutes ses formes: animales, presque humaine quelquefois, forçant l'imagination. Alors nous avons devant les yeux un zoo plus vrai que nature: comme une rivalité entre monstres (ou pas) qui fait soudain irruption au-dessus des flots rageurs à l'écume bouillonnante. Une baleine, un dromadaire, un rhinocéros, un oiseau peut-être, chacun y voit ce qu'il ressent. Ici, magie et mysticisme ne font plus qu'un. Mais là encore, je sais, je vais me répéter! Comme partout en Bretagne, c'est pendant la période hivernale et en pleine tempête que le show est le plus grandiose, alors que surgissent des tourbillons d'écume qui masquent un instant ces sentinelles de pierre pour les rendre plus vivantes que jamais: on pourrait même se demander si sous cette houle rageuse, les esprits des marins emportés ne se libèrent pas pour exprimer leur colère. Alors vous-même qui observez les phénomènes, ne vous approchez pas trop du bord, la falaise pouvant être friable particulièrement à cette époque. Voilà ce qui a tellement attiré les artistes : Port-Coton est un vrai musée naturel dont les œuvres d'arts se transforment à volonté dans l'imaginaire de celui qui les contemple. Chaque pierre, chaque rouleau d'écume, le brouillard chassé par le soleil, les couleurs changeantes, la baie, le chemin, tout se transforme au gré de vos envies pour être mieux immortalisé par vos photos et dans l'esprit de chacun... Si je vous en parle ainsi, c'est que je l'ai moi vécu. Le soir, au coucher du soleil, quand le ciel jauni, puis rougi fait saigner les flots, ce ne sont plus les Korrigans qui font une ronde, mais les aiguilles de Port-Coton qui chantent la bravoure des pêcheurs engloutis afin qu'on ne les oublie jamais
Les plages :
Faire le tour de l'ile, c'est aussi profiter d'une 60aine de plages et autant de petites criques toutes plus intimes les unes que les autres ou au contraire facilement accessibles pour les groupes de randonneurs souvent âgés, les familles et aussi leurs bateaux. Trop nombreuses pour être toutes citées ici, nous retiendrons tout de même les qualificatifs employés par l'office de tourisme: familiales, sportives, romantiques, spectaculaires, photogéniques, ou encore " Koh-lanta style!", chacun y trouve son compte en fonction de ce qu'il recherche. Les "grands sables" est la plus grande, mais pas forcément la plus fréquentée. Prolongée par la jolie plage de Samzun, elle promet un farniente et une baignade mémorable. Certaines comme Port-york ou celle du Grand rocher possèdent encore des ruines de fortifications accessibles à marée basse. Celle de Bordadoué offre aux famille 100 m de sable fin pour d'agréables balades. Et saviez vous qu'après une tempête, les coquilles Saint-Jacques affluent sur le rivage, cela vaut sans doute le coup de se mouiller les pieds ! La plage de Kerdonis, entre Landes d'ajoncs et bruyère assure non seulement une jolie vue sur les îles mais aussi sur le phare du même nom qui fait scintiller les nuits de trois éclats rouges toutes les 15 secondes. La "belle fontaine de Vauban" se trouve aussi sur une plage.
La meilleure façon d'apprécier Belle-île, c'est donc la randonnée, que ce soit pour en faire le tour et profiter des paysages marins, pour savourer la douceur des villes et villages aux maisons de couleurs, ou pour décompresser sur les petites routes de campagne, sillonnant de ferme en ferme en saluant au passage quelques chevaux de labour ou quelques poules indiscrètes. Çà et là, un vieux paysan emmène ses vaches au pâturage ou nourrit ses cochons. Il y a aussi de jolis jardins qui décrivent l'amour des autochtones pour leur île chérie. Et la cerise sur le gâteau, c'est ce bus régulier qui fait le tour de l'île dans les deux sens, reliant les principaux points d'intérêts. Mon conseil : si votre séjour s'étend sur quelques jours, depuis votre lieu d'hébergement, offrez-vous une première balade sur une journée et revenez en bus. Le lendemain, reprenez le bus jusqu'au point où vous vous êtes arrêtés la veille pour continuer à pied la balade...et ainsi de suite. Croyez-moi, le jeu en vaut la chandelle! Belle-île est une terre de paix qui mène au lâcher-prise. On en ressort ressourcé et remagnétisé.
Où dormir à Belle-île :
* Hôtel : le grand large: à Bangor : dans une bel édifice en brique rouge, cet hôtel de charme offre un joli panorama sur la mer et les rochers depuis les fenêtre de jolies chambres aux couleurs harmonieuses. Centre de Thalasso à proximité et piscine.
* Hôtel Atlantique : au Palais: dans un bâtiment du XVIIIe siècle, belle vue sur le port et la citadelle, bon accueil et restaurant de fruits de mer. Prix confortables.
* Hôtel du phare à Sauzon : idéalement prlacé sur le môle près du phare, vous avez le choix entre la nuit d'hôtel ou la location d'appartements. Jolie vue sur le port, restaurant de fruits de mer... mais pas que!
* Chez Jocelyne L'hermite : A Bangor. Jolie maison d'hôtes avec jardin fleuri près de la plage. Très bon accueil et copieux petit déjeuner. Ballades sur le Gr tout proche.
* Plusieurs gîtes de randonnées sont à disposition des marcheurs, souvent proposés par les sites web de randonneurs (que vous ne trouverez pas forcément ailleurs). Les chambres en commun de type auberge de jeunesse ont l'avantage de proposer des prix bas et de faire des rencontres sympatiques avec d'autres randonneurs. Les repas aussi pris en commun sur la grande table en bois permettent de découvrir les produits frais locaux dans une atmosphère familiale et conviviale. Un copieux petit déjeuner est souvent compris dans le tarif. Réservation pour groupe ou individuels.
* Le gîte d'étape de Port-Guen: au Palais est une bonne adresse: Très bon accueil, bon prix, et produits du terroir. Station de bus à proximité et sentier de randonnée pour se rendre au Palais ou pour commencer votre périple à pied. (je l'ai moi-même expérimenté pendant 4 jours, j'en garde un excellent souvenir.)
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